Le XVème CONGRÈS SYNDICAL MONDIAL : Rapport d’Analyse et d’Orientation

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1- Le syndicalisme doit faire face aux défis de notre temps !

1) En ce début de siècle les responsabilités du syndicalisme sont immenses ! Depuis chaque entreprise jusqu’au niveau international, il se doit d’organiser, de confronter, de proposer, de débattre, de négocier, de construire, de lutter pour protéger les intérêts légitimes des travailleurs et leurs familles.

2) Il doit le faire sans relâche, sans compromission, avec comme seul objectif : répondre dans tous les domaines aux attentes de ceux qu’il représente dans leur diversité. Cela est vrai sur tous les continents, dans toutes les industries, avec les travailleurs salariés ou les chômeurs, les jeunes ou les plus anciens, avec les femmes ou les hommes.

3) C’est de sa capacité à assumer pleinement ce rôle, qu’il tire sa légitimité. S’en détourner ruinerait sa crédibilité! Pour le syndicalisme, il n’y a par conséquent d’autres choix possibles, d’autres orientations que celles qui consistent à être fidèle à cette mission quel que soit le lieu ou se déploie son activité, quel que soit le temps ou même la nature du système économique, social ou politique auquel il agit.

4) Ce sont les travailleurs eux-mêmes et nul autre qu’eux qui décident du syndicalisme qui doit être le leur. Ils doivent le faire dans le respect des traditions historiques nationales et professionnelles qui sont les leurs, sans intervention extérieure de quelque nature que ce soit. C’est là la condition, et c’est ce qui garantie l’indépendance, et donc l’autorité du syndicalisme dont ils ont à faire le choix !….

5) La Fédération Syndicale Mondiale entend respecter et promouvoir ces principes, ils sont à la base de ce que doit être la force et la cohésion du mouvement syndical international. Associer à cela le respect de la diversité ce qui est se respecter soi-même, favoriser son unité et donc son efficacité.

6) Pour autant, le syndicalisme aujourd’hui répond t’il aux attentes, aux besoins et aux nécessités de notre époque? Nul ne saurait être dispensé de se poser de telles questions, a fortiori au moment ou de nombreux syndicats à travers le monde s’interrogent sur le devenir du syndicalisme international !

7) Pour sa part la Fédération Syndicale Mondiale, dans la perspective de son XVème Congrès mondial, entend être partie prenante de ce débat et souhaite encourager ses affiliés, ses amis à faire de même et donc à prendre des initiatives unitaires en ce sens. Comme c’est le cas avec le Forum syndical de Pékin qui contribue à donner un cadre supplémentaire au dialogue et à l’action du syndicalisme international.

8) Car, face à une situation nouvelle pleine de risques mais non sans opportunités, bien des questions se posent et de la pertinence des réponses que saura apporter le syndicalisme dépendra pour l’essentiel la place qui sera la sienne dans le monde tel qu’il est devenu aujourd’hui et tel qu’il sera demain !

Des questions pour le débat !

9) A l’occasion de ce XVème Congrès mondial de la FSM, et de son 60ème anniversaire nous entendons nous interroger sur la place du syndicalisme dans le monde :

10) A t’il la capacité et les moyens, la volonté, de peser réellement sur les décisions prises par les gouvernements, le patronat, les institutions ? Celle d’être un contre–poids efficace face aux politiques économiques et sociales néo libérales agressives et coûteuses au moment d’être mise en œuvre, synonyme de l`anéantissement des conquêtes historiques des travailleurs, de destruction des systèmes de protection sociale, de la santé et de l´ enseignement, des retraites et des pensions, de l’environnement?

11) Les pratiques des entreprises transnationales, les délocalisations, les privatisations, le pillage des ressources, voulues par le FMI et la Banque mondiale, et par les institutions financières ne devraient-elles pas encourager le développement d`une nouvelle solidarité syndicale internationale, en particulier au niveau des branches et des régions, en favorisant des coordinations unitaires sans aucune exclusive ? Cette exigence est-elle une priorité pour tous les syndicats internationalement affiliés ou non ?

12) Qu’elle est l’influence qu’exerce le syndicalisme au sein de structures supranationales comme les traités de libre échange ? Ou encore sur les décisions souvent unilatérales et coercitives prises au sein de certaines institutions internationales ?

13) La libéralisation et l’orientation du tout vers l’exportation de secteurs stratégiques comme l’agriculture et l’alimentation en fonction des règles du marché, la recherche de la rentabilité à tout prix, ont contribué à déstabiliser de nombreux pays en particulier dans le Tiers Monde. Les institutions financières et les multinationales de l’agrobusiness sont une menace pour l’environnement, la souveraineté et le libre choix des Etats, ont poussé des millions de travailleurs et leur famille à la misère, à la famine en aggravant leur endettement, leur dépendance. En encourageant l’exode rural on a ainsi favorisé la création d’une énorme armée de réserve, en même temps qu’une urbanisation source de mal vivre et d’insécurité.

14) Le syndicalisme ne doit-il pas construire avec le mouvement paysan une alliance solide, pour mettre un terme au pillage, pour la récupération des terres et des moyens de production nécessaires, pour la défense et la promotion des cultures permettant l’autosuffisance alimentaire répondant prioritairement aux besoins domestiques, contribuant ainsi à de véritables réformes agraires Il est nécessaire une lutte commune de tous les travailleurs alliés aux paysans et aux populations rurales en vue de lutter pour des reformes agraires démocratiques et progressistes qui délivrent la terre aux mains de ceux que la travaillent. Nous tous devons lutter pour atteindre la souveraineté alimentaire en tant qu’une expression de la véritable souveraineté des peuples.

15) Les syndicats demeurent-ils pour les jeunes générations, pour les travailleurs migrants, mais aussi pour les chômeurs, et ceux dépourvus de droits, ceux exclus des conventions collectives, le cadre naturel permettant de s’organiser et de se défendre ? Qu’en est-il ainsi des millions de travailleurs et travailleuses dans le secteur informel ?

16) Depuis plusieurs années, consécutivement à la crise économique et sociale, des phénomènes de désyndicalisation sont apparus et se sont aggravés. Les campagnes médiatiques de discrédit, la négation de l’action collective, la répression, les assassinats des syndicalistes et la remise en cause du droit à se syndiquer, à faire grève, à manifester ont également contribué à entretenir un climat particulièrement nocif.

17) Comment répondre efficacement et unitairement à cette offensive anti-syndicale, qui cherche au nom de la lutte contre le terrorisme à criminaliser celle-ci ?

18) Voilà bien des questions qui appellent des réponses de la part du syndicalisme et qui se posent à tous et sans exclusive, quels que soient les pays, les continents, les sociétés ! Chercher à y répondre avec modestie et sans esprit partisan nous semble essentiel !

Une situation nouvelle, des enjeux inédits :

19) Pour la FSM, la période qui vient de s’écouler a débouché sur des tensions, des crises internationales qui ont rendu l’avenir du monde plus incertain ! La globalisation capitaliste, la domination impérialiste caractérisée par l’arrogance de certains gouvernements comme celui des USA et par la recherche effrénée du profit maximum à court terme ont poussé à une réduction spectaculaire de la valeur du travail.

20) Les politiques d’ajustement structurels, les traités de libre échange privatisation des services, les restructurations industrielles, le pillage des matières premières, le réarmement, l’exclusion et la marginalisation de millions de travailleurs, les violations des droits des migrants ou encore des femmes, ont contribué à l’instabilité, au désordre, à favoriser un climat d’intolérance, à l’insécurité, aux guerres, y compris à des guerres préventives, à l`arrogance… , à la loi du plus fort dans les relations internationales !

21) Les Etats Unis, l’Union européenne, le Japon et le complexe militaro industriel qui leur est lié cherchent à imposer au reste de l’humanité une nouvelle architecture des relations internationales fondée sur la coercition, l’unilatéralisme et la négation de la souveraineté des Etats et par une transformation du système international allant jusqu'à la remise en cause de la finalité de la Charte des Nations Unies.

22) Les guerres génocides déclenchés par les Etats Unis avec le soutient de leurs alliés inconditionnels ont fait recours de toutes leurs forces en Yougoslavie, Afghanistan et l¨Irak et ce nous montre jusque auquel point il est nécessaire l´action de toutes les forces progressistes du monde en faveur de la Paix et contre la course aux armements des grandes puissances qui prétendent maîtriser le monde.

23) Il n’est pas excessif de dire qu’un recul de civilisation menace l’humanité tout entière et n’est pas sans faire craindre de nouvelles barbaries ! La défense de la souveraineté des nations et des conquêtes démocratiques atteintes par l Humanité dans les domaines politiques, social, et culturel pendant des siècles c’est un devoir à ne pas manquer par tous les travailleurs et leurs organisations.

24) Pour autant, la Fédération syndicale mondiale considère qu’il n’y à là aucune fatalité ! Car il est faux de prétendre que le monde serait comme impuissant, où désarmé face à de tels risques !

25) Dans ces conditions faudrait-il se diviser, s’opposer les uns aux autres au nom d’un prétendu conflit de civilisations, accepter la remise en cause des libertés individuelles au nom d’une prétendue lutte contre le terrorisme, renoncer au droit à résister, à défendre souveraineté et droit à l’autodétermination, laisser faire le racisme, renoncer au progrès social, au plein emploi, à de justes rémunérations, à la justice ?

26) 60 ans après les horreurs d’une guerre mondiale dont les traces restent vives et la mémoire intacte les massacres d’Hiroshima, de Nagasaki, des camps de la mort en Europe ainsi que les sacrifices de ceux qui ne renoncèrent jamais à vaincre le fascisme, 30 ans après l’héroïque victoire du peuple vietnamien, faudrait-il abandonner l’ambition d’un monde sans guerre, d’une humanité de paix ?

27) S’agit-il enfin « d’humaniser » la mondialisation, de la réguler dans le cadre de ce que décident, les employeurs, les institutions financières, le FMI, l’OMC, et la Banque Mondiale ?

28) Le monde du travail ne devrait-il avoir pour seule perspective que la recherche de l’aménagement d’un système qui a fait croître si dangereusement les inégalités entre continents, entre pays, et au sein même de chaque société ? Faudrait-il renoncer à l’exigence de justice sociale, d’égalité entre les hommes et les femmes, entre les races ?

29) Par conséquent, faudrait-il renoncer à des décennies de luttes solidaires qui ont contribué à lever l’espoir en faveur d’une véritable alternative, celle d’un monde meilleur, libéré des exploitations, des frustrations, des aliénations, des humiliations ?

30) A toutes ces questions au XV ème Congrès mondial la FSM entend répondre : NON !

Nous devons réaffirmer nos principes !

31) Le syndicalisme ne saurait avoir pour fonction et pour ambition de limiter sa gestion aux conséquences de la mondialisation capitaliste ! Il doit déterminer ce qu’en sont les causes pour les confronter, les contester, s’y attaquer et permettre de s’en dégager.

32) Face à de tels défis et forte de l’expérience qui est la sienne, la Fédération syndicale mondiale considère que rien n’est plus urgent que de favoriser l¨internationalisation des luttes et des résistances contre toutes les manifestations de la rapacité du capital !

33) Pour la FSM, le nouvel ordre mondial, les dogmes du marché, ne sauraient représenter un cadre indépassable ! Voilà pourquoi nous sommes avec ceux et celles qui affirment qu’ « un autre monde meilleur est- il possible », un monde débarrassé de l’exploitation, de toutes les formes de soumission, du pillage des ressources économiques et écologiques, un monde débarrassé de l’arrogance, de l’unilatéralisme, de la coercition, des sanctions et des embargos économiques, politiques et culturels.

34) Le syndicalisme représente une longue histoire de libération humaine, de victoires et de défaites. Mais il demeure toujours une force organisée, une école de démocratie avec une influence de par le monde plongeant loin ses racines dans les réalités sociales, les histoires nationales. Il constitue par conséquent pour les travailleurs un bien commun et un patrimoine précieux pour l’humanité.

35) Voilà pourquoi nous considérons qu’il faut revaloriser le syndicalisme, lui redonner un contenu concret et s’agissant du syndicalisme international le débarrasser de tout ce qui entrave son action, brouille son image, parce qu’il reste encore trop institutionnalisé, trop fonctionnarisé, trop bureaucratisé, trop formaliste et trop soucieux des honneurs.

36) Pour revaloriser le syndicalisme nous devons le faire depuis l’entreprise jusqu’ au niveau des groupes, des branches, car son existence n’a de sens que s’il est utile aux travailleurs, à la solidarité, dans les luttes nationales et professionnelles, afin que celles-ci puissent s’articuler entre elles pour s’imposer nationalement, régionalement et internationalement.

37) Tout ceci est en dépendance de la volonté de la Fédération syndicale mondiale et à partir du moment auquel nous sommes, nous voulons contribuer à cette transformation, à ce saut qualitatif nécessaire pour être en mesure de répondre aux attentes et aux défis de notre temps ! Nous avons conscience que pour cela nous devons changer profondément nos comportements et nos pratiques ! Nous avons conscience de ce que cela représente, y compris une remise en cause !

38) Cela exige des changements quant à notre façon de travailler à tous les niveaux de notre organisation internationale ! Des changements dans nos méthodes et nos façons de faire ! Nous sommes disponibles, nous voulons travailler avec tous. Il ne s’agit pas seulement de l’affirmer, il faut le faire !

39) C’est pour cela et pour tout cela que nous faisons appel dans un esprit d’ouverture et d’écoute à tous ceux et celles qui avec nous partagent les mêmes convictions, mais nous le faisons aussi à tous les autres, non dans un esprit de chapelle, de clan, mais dans un esprit unitaire et avec l’objectif de rassembler le mouvement syndical international dans le respect de ses différences. Débattons, retrouvons-nous pour chercher ensemble les réponses efficaces aux défis de notre temps, agissons pour que le syndicalisme demeure une force vivante et active.

Nous sommes disponibles !

40) C’est pourquoi nous n’avons ni exclusive, ni a priori, à l’égard de quiconque. Nous voulons tirer avec lucidité les leçons de nos défaites et inviter chacun à faire de même. Nous souhaitons le faire dans un esprit critique et donc constructif. Cette ambition de voir le syndicalisme international assumer beaucoup mieux les responsabilités qui sont les siennes implique un véritable renouveau, un changement radical de comportement, c’est à dire tout autre chose que de l’apparence. Ceci suppose de bien mesurer ce que sont ses insuffisances ! Cela vaut pour chaque organisation syndicale nationale et internationale, cela vaut donc pour la FSM elle- même.

41) Nous voulons partager une ambition commune : donner au syndicalisme et par conséquent à ceux qu’il entend représenter de par le monde la place et le rôle qui leur revient.

42) C’est pour cela que la FSM souhaite à l’occasion de son Congrès mondial lancer un appel à l’action et à l’unité du mouvement syndical international sue les bases de la lutte commune pour la défense des véritables intérêts des travailleurs et des peuples face l´actuel ordre international injuste et exploiteur qui s´impose aujourd’hui par le monde.

43) Respectons-nous tels que nous sommes ! Ne décevons pas les attentes et les espoirs de millions de travailleurs à travers le monde, sachons nous, nous hisser à la hauteur des enjeux de cette période de profonde transformation de l’humanité. Sachons être les syndicalistes de ce nouveau siècle en étant à la hauteur de ses enjeux.

44) Contribuons à mettre en mouvement cette force qu’est le syndicalisme dans le contexte de la mondialisation et des défis qui touchent à son travail et à sa finalité. Nous avons la possibilité d’agir et, dans ce sens, les expectatives sont ouvertes. L’avenir dépend de nous. Sachons être les syndicalistes de ce nouveau siècle, à la hauteur de ses défis.

2 - Résister à une re-mondialisation capitaliste source d’injustices grandissantes :

45) En 2004, le rapport résultant du groupe de travail de l’OIT sur la mondialisation a souligné les conséquences d’un véritable désastre social à l’échelle de l’humanité tout entière.

46) Trois décennies après le commencement de l’application des politiques néolibérales, qui ont caractérisé l’étape de la globalisation capitaliste, le monde présente aujourd’hui une économie stagnante, avec le plus haut taux de chômage et le plus haut pourcentage de pauvres de son histoire. Ce monde est bouleversé par des révoltes sociales dans les régions les plus défavorisées, plongées dans une instabilité politique et, comme si cela ne suffisait pas, leur intégrité territoriale et leur indépendance politique sont explicitement en danger.

47) À la fin des années 80 par exemple en Amérique latine et en Afrique il y avait un consensus pour proclamer ces années comme la décennie perdue car, en 1982 déjà, ces continents souffraient de la plus grave crise économique des 50 dernières années. Vingt cinq ans après nous pouvons affirmer sans crainte de nous tromper que le processus n’a pas été seulement une perte mais aussi une véritable catastrophe.

48) Cependant nous avons été témoins d’une montée de la résistance mondiale contre les effets de la globalisation néolibérale du capitalisme et de la reprise du contrôle impérialiste dans un monde devenu unipolaire. La croissante mobilisation populaire contre la situation actuelle et contre le régime politique responsable de l’avoir produite a amené à une délégitimisation universelle du néolibéralisme, pas seulement en tant qu’axe de contrôle des politiques de l’Etat et du mouvement de l’économie, mais aussi avec une volonté hégémonique virtuelle de domination pour l’ensemble de l’existence sociale.

49) Cette délégitimisation idéologique et politique du néolibéralisme nous impose un débat sur les choix des orientations des politiques économiques, sur les perspectives immédiates et futures d’action et sur le respect des plus graves conséquences sociales de la domination prolongée du capitalisme néolibéral : la croissance du chômage, l’augmentation du nombre de pauvres et de l’extrême pauvreté.

50) C’est difficile à reconnaître mais ces politiques néolibérales ont été imposées sans ou avec peu de résistance et ont pu être mises en œuvre durant ces deux dernières décennies. Ce processus a été également alimenté par la crise qui s’est abattue sur les formes traditionnelles de représentation politique. Ni les partis de la soi-disant gauche traditionnellement social-démocrate, ni les organisations syndicales étroitement liés a eux , ont été capables de s’opposer à l’application de celles-ci et dans beaucoup de cas, ils ont cru au chant des sirènes qui les encourageaient à cause de leur propre faiblesse et de l’opportunisme montant, ces politiques ont été appuyées décisivement. Il y a eu des cas particulièrement remarquables en Amérique latine, en Europe et aux Etats-Unis, des régions avec des traditions syndicales, où l’engagement et la dépendance des nombreuses organisations syndicales avec le gouvernement en place, les ont conduites au service des classes dominantes.

51) Le syndicalisme, au niveau mondial, a traversé une profonde crise, caractérisée par l’incapacité de donner des réponses aux pertes progressives des conquêtes historiques des travailleurs. Les attaques du capitalisme et de son modèle néolibéral, avec ses séquelles de privatisations, de destructions, de fragmentations des secteurs publics et productifs ont atteint directement les syndicats dans leurs politiques et ont réussi à les désarticuler, à les affaiblir, à leur faire perdre des millions d’adhérents et, le plus regrettable dans beaucoup de cas, à prendre chaque fois de plus des positions de conciliation et à abandonner la lutte comme outil fondamental de leur existence.

52) Si à cela nous rajoutons l’impossibilité des partis politiques et des syndicats à déchiffrer correctement les clés de notre temps, la détérioration de leurs structures et pratiques organisatrices, leur incapacité à donner un message cohérent pour les grandes masses, il est facile a comprendre d’une part les raisons pour lesquelles ils sont en crise, et, d’autre part, celles qui expliquent l’émergence des nouvelles formes de luttes et mouvements de protestation sociale.

53) Nous ne devons pas être alors étonnés par le fait que de grands secteurs de travailleurs déplacés vers l’économie informelle et la subsistance, unis à des millions d’êtres humains également exclus par le système: indigènes, paysans, femmes, jeunes et étudiants, ont cherché des nouvelles formes d’organisation pour affronter les tragiques conséquences de ce modèle.

54) Il est évident que de nouveaux sujets sociaux avec des discours et des formes d’organisation et de mobilisation différente, se sont formés sur la scène politique dans de nombreux pays comme des acteurs décisifs.

55) Tout au long de ces années la lutte des mouvements sociaux a dépassé les frontières de chaque pays et a cherché les formes d’organisation qui structurent les actions au niveau global et régional. Ce n’est pas seulement une tactique de résistance ou de solidarité qu’il faut, mais une nécessaire stratégie pour promouvoir la lutte dans tous les pays.

56) C’est comme ça que nous avons créé des réseaux et des campagnes rassemblant les plus divers secteurs sociaux pour lutter contre « le libre échange », la militarisation, la dette extérieure, pour les droits à la terre, et à l’environnement.

57) Les grandes mobilisations à Seattle, Washington et Genova n’ont pas montré seulement le croissant mécontentement des peuples en face du consensus de Washington, mais elles ont aussi attiré l’attention sur le besoin de structurer la lutte comme étant la seule voie pour avancer vers des espaces non seulement contestataires mais de construction d’alternatives.

58) Ce n’est pas par hasard que le Forum social mondial soit né à Porto Allègre au Brésil, c’est à dire en Amérique latine, la région la plus touchée par des politiques néolibérales et où les mouvements sociaux ont atteint un important degré d’organisation et développement. Nous sommes arrivés à ce scénario, par exemple avec l’extraordinaire expérience de lutte contre la mise en place de la zone de libre échange des Amériques (ZLEA), un projet encouragé par les Etats-Unis en vue de la re-colonisation des pays de la région.

59) Tout ceci nous amène à une conclusion : les enjeux du monde d’aujourd’hui affectent tous les domaines de la société avec la même intensité, voilà pour quoi la lutte c’est le devoir de tous et nous tous devons y participer.

Grands enjeux de l’humanité.

60) Alors que depuis la fin de la guerre froide, on prétend que les droits de l’homme avancent à grands pas, le progrès n’a toujours pas permis d’améliorer le sort de l’humanité.

61) Il y a évidement des causes et des responsabilités à cette situation. Dénoncer les causes ne suffit pas si l’on veut prétendre s’attaquer à la racine des problèmes qui assaillent l’humanité tout entière.

62) Prenons quelques exemples :

a) L’Assemblée générale de l’ONU a proclamé la période 2005-2015 « Décennie internationale d’action pour l’eau, pour la recherche de l’eau, source de vie ».La pénurie d’eau au monde c’est une menace pour l’avenir. Beaucoup de maladies ont un lien direct ou indirect avec l’eau et sa qualité, et la pollution est le principal facteur de la rareté de l’eau potable. Mais qu’en est-il des causes de cette situation ? Elles sont dues essentiellement aux activités industrielles, la déforestation, ainsi qu’à la construction de grands ouvrages qui ont causé la pollution d’environ 60% des fleuves les plus importants de la planète et le déplacement de 40 à 80 millions de personnes depuis les années 50. Le FMI, la Banque mondiale, et les grandes entreprises transnationales assument une responsabilité criminelle dans cette situation.

b) Pendant qu’en 2003 les pays développés ont transféré aux pays sous-développés 68’400 millions des dollars en tant qu’aide officielle au développement, les pays du tiers monde ont payé 436’000 millions aux pays riches comme paiement de la dette et ses intérêts. Voilà pour quoi nous pouvons nous demander qui aide qui ?

c) Quelle conclusion allons-nous tirer du bilan qui a fait apparaître en 10 ans une concentration des revenus, des ressources et de la richesse dans les mains d’un petit groupe de personnes, d’entreprises, et de pays et cela au détriment du plus grand nombre? Dans le monde un enfant sur cinq en âge scolaire, ce n’est à dire quelque 120 millions, n est jamais allés à l’école. Mais ceci ce n’est pas un problème seulement des pays pauvres. En 2004, 46 millions d’étasuniens ont ainsi été privés du droit élémentaire d’accès à la santé !

d) L'inégalité entre le cinquième le plus pauvre de la population mondiale et le cinquième le plus riche est passée de 30 à 1 en 1960, à 90 à 1 aujourd'hui. La richesse nette des trois personnes les plus riches au monde dépasse le revenu national cumulé des 48 pays les plus pauvres, et les 225 individus les plus riches possèdent une fortune cumulée (de plus de mille milliards de dollars US) équivalente au revenu annuel des 47% des plus pauvres de la population mondiale. La Général Motors vient d'annoncer un chiffre d’affaires de 178 milliards de dollars, soit un résultat supérieur au PIB de l’Afrique du Sud ou de l’Egypte. Il y a bien évidemment des responsables de cette situation !

e) Les pays pauvres sont tenus d'ouvrir leur marché, alors que les pays riches les ferment par des mesures protectionnistes.

f) Les pays développés imposent ainsi au reste du monde un protectionnisme commercial de 365 milliards de dollars, soit 1 milliard de dollars par jour. Les USA ont instauré de nouveaux tarifs d’importations et l’Union européenne élève des barrières techniques et économiques, mais ces normes ne sont pas imposées à ses propres membres. Une vache pâturant dans les champs de l’Europe reçoit en moyenne 2 euros par jour en tant que subside, pendant que 2 milliards d’êtres humains vivent très mal avec moins de cette quantité. Parmi eux 24 mille meurent de faim chaque jour.

g) Pendant que dans le monde on gaspille tous les ans plus d’un billion de dollars en cosmétiques, plusieurs mois après la catastrophe du Tsunami, rien n'a encore été fait pour les réparations et accélérer la reconstruction. Au Sri Lanka, plus de 600.000 personnes qui ont perdu leurs maisons dans le tsunami vivent toujours dans des camps de fortune.

h) La même chose peut être dite par rapport à l’Irak ou l’Afghanistan. Après leur avoir imposé la guerre et la destruction, l’administration des Etats-Unis reconnaît elle-même que près de 9 billions de dollars, qui ont été consacrés à la reconstruction de l’Irak, restent toujours introuvables.


Il faut confronter les causes autant que les conséquences !

63) Voilà pourquoi il ne saurait y avoir d'issue durable sans confronter l'ensemble des mécanismes et des réglementations mise en place au service exclusif des sociétés transnationales avec les nouveaux dispositifs au centre des négociations qui visent à perfectionner tout un système de contraintes à l'égard des Etats comme des individus. En fait, ne s'agit-il pas de démanteler la logique sur laquelle l'ensemble des relations commerciales, financières, économiques, sociales a été fondé jusqu'à ce jour. ¿Après le colonialisme vulgaire va t’on connaître le colonialisme sophistiqué ?

64) Ce qui est à l'ordre du jour, c'est l'examen lucide et courageux de ce qui demeure la logique néo-coloniale de la division internationale du travail. Il ne saurait y avoir ceux qui décident et ceux qui obeissent. Tant que l'on interdira le libre accès aux technologies, aux marchés, que l’on ne modifiera pas les termes de l'échange qui aujourd'hui entretient l'hémorragie de capitaux des pays du Tiers monde à l'égard du Nord, on perpétuera un système qui à terme ne peut-être que source de guerres, de conflits, de pillages et de sous-développement.

65) C'est pourquoi on ne peut pas réfléchir à une alternative économique, sociale et politique indépendamment de la nature du système international et du rapport de forces qui le domine. On ne saurait en même temps dénoncer la globalisation capitaliste et ses conséquences drastiques tout en étant complaisant ou bien peut critiques, quant aux moyens pour s'y opposer.

66) Il est évident que nous devons lutter pour la condamnation de la dette externe mais, ¿Que vaut l'annulation de la dette si on ne met pas en cause également l'ajustement structurel auxquels sont soumis les pays avec des recettes imposées par la Banque mondiale et le FMI pour blanchir ses finances ?

67) Dans ces conditions, faudrait-il se résigner, et avoir pour unique ambition de corriger les excès du capitalisme, limiter le désordre sans mettre en cause le fond, c’est-à-dire la domination du capital; dénoncer seulement les activités parasitaires?

68) ¿Faut-il souhaiter seulement une régulation permettant une « mondialisation responsable » comme l’ont défendue les participants de Davos ou encore « une économie de marché mais pas d'une société de marché »?

69) C'est pourquoi, les peuples, les travailleurs, leurs organisations qui mènent la principal bataille dans leurs propres pays ont plus que jamais besoin d’internationaliser leurs luttes, articuler celles-ci depuis leurs lieux de travail, leurs villages, jusqu’à l’échelle mondiale en favorisant et en coordonnant leurs actions dans les groupes multinationaux à travers leurs syndicats comme à travers les communautés paysannes, indigènes… Il s’agit de construire et multiplier les réseaux, les contre pouvoirs face aux institutions supranationales, aux institutions financières, aux puissances hégémoniques qui s’abrogent le droit de décider pour le monde. Il s’agit de se donner les moyens d’un large débat tout autant sur la stratégie que sur les contours qui devraient être ceux d’une société capable de mettre l’ensemble des ressources productives du monde au service des besoins et des aspirations des habitants de la planète.

70) La période qui vient de s’écouler a été particulièrement riche en luttes sociales, en résistance de toute nature. Sur tous les continents les mobilisations sociales ont contribué à tenir en respect la rapacité du patronat et les politiques antisociales, elles ont permis des résultats concrets et ont montré la valeur de l’action collective, elles ont contribué à favoriser des changements plus profonds sur le plan politique.

Sur tous les continents des résistances nouvelles

71) C’est vrai tout particulièrement en Amérique latine à travers la richesse des luttes contre les accords de libre échange (ZLEA). Ce vaste plan de re-colonisation hémisphérique qu’ont essayé d’imposer les Etats-Unis constitue une machine de guerre contre les peuples. Les mégaprojets qui s'inscrivent dans le Plan Puebla Panama et le Plan Colombie visent au contrôle territorial et militarisé de toute l'Amérique centrale et la région des Andes, avec une redistribution des populations et un aménagement des activités économiques dans lesquelles on retrouve les plus grandes compagnies transnationales nord-américaines.

72) Face à ces propositions impérialistes est née la nouvelle alternative de l’ALBA (Alternative bolivarienne pour les Amériques) laquelle contrairement au ZLEA, met l’accent sur la solidarité dans la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale et exprime donc les intérêts des peuples latino-américains. Il va plus loin qu’un simple accord commercial car il plonge ses racines dans les origines de la véritable intégration latino-américaine ce qui a été le rêve des pères fondateurs de l’indépendance.

73) À l’origine de cette initiative, Cuba et le Venezuela contribuent ainsi à créer les conditions d’une véritable alternative. Les travailleurs et leurs syndicats a l’Amérique latine dans l’unité avec le mouvement social, indigène, avec les communautés, les travailleurs et les syndicats latino-américains ont ainsi accumulé une expérience qui renforce la pertinence qu’un autre type de développement est possible.

74) Ce qui est vrai en Amérique latine l’est également pour d’autres régions du monde ! En Asie le mouvement contre les privatisations, en Inde, la défense des services publics, le respect du droit syndical en particulier chez les fonctionnaires, se sont exprimés à travers de nombreuses manifestations et grèves.

75) 20 ans après le drame de Bhopal l’action se poursuit contre les pratiques criminelles de Dow chemical. La vitalité du mouvement syndical indien a joué un rôle déterminant dans l’orientation combative donnée au Forum social de Mombay.

76) Dans cette région si large du monde le syndicalisme occupe une place importante, et développe des initiatives unitaires, se ressemble et fait front efficacement dans la défense de l’exercice du droit syndical.

77) En Afrique, les peuples se soulèvent contre la poursuite des pillages auxquels se livrent les multinationales, contre les conséquences des guerres et des confrontations qu’encouragent les puissances occidentales qui souhaitent maintenir une situation d’instabilité et de division propice à l’exploitation permanente des richesses naturelles. La lutte des peuples africains contre la pandémie di VIH-SIDA et leur confrontation aux transnationales des médicaments doit conter sur la solidarité de tous les travailleurs du monde .C’est un crime voir mourir des millions de personnes infectées par le VIH et ne pas lever nos drapeaux de lutte contre ce fléau et contre les politiques du monde riche qui aident a sa perpétuité.

78) En Europe, le bilan des politiques d’accompagnement a été catastrophique. Après la croissance rapide des années 50 et 60, pendant les dernières années tout a été fait pour encourager le gaspillage, la destruction des vieilles conquêtes sociales, mettre en cause la sécurité d’existence des gens, l’application de politiques discriminatoires et xénophobes, et augmenter les antagonismes entre le Nord et le Sud.

79) Le bilan social de l’Europe est quant à lui en régression sur tous les fronts. Le Mouvement syndical réagit et multiplie les initiatives revendicatives pour mettre fin à cette spirale de l'enrichissement d'une minorité et à l'augmentation du chômage, de la pauvreté. Par contre la vie nous a montré que l’action du mouvement syndical n’a pas été suffisante et n’a pas évité les actuels niveaux de détérioration en ce qui concerne l’emploi, les services sociaux et publics, la sécurité sociale, etc.

80) Plus encore, l’alignement de l’Europe sur la politique impérialiste des USA n’a jamais été aussi évident, c’est d’ailleurs là un des arguments les plus malhonnêtes des partisans d’une Constitution européenne qui prétend faire contre poids aux États-Unis. Cela a été vrai dans la guerre contre la Yougoslavie et l’Afghanistan avec l’indubitable support à la guerre en Irak et après, dans la tentative de gestion de la situation dans ce pays pour l’obtention de grands bénéfices. Cela est évident par rapport au soutien qui donne l’Europe à la politique des Etats-Unis contre Cuba et le Venezuela, dans les conflits du Proche orient, dans l’attitude à l’égard d’Israël et a contrario vis à vis de la Syrie, de l’Iran et du peuple Palestinien.

A vrai dire c’est un signe très encourageant le puissant NON a la Constitution capitaliste européenne exprimé par les travailleurs et le peuple français dont 80 % des ouvriers, 70 % des employés et le 60 % des jeunes et aussi plus tard par le peuple des Pays bas. Ceci a été la plus évidente expression du croissant refus envers la société capitaliste dans leurs domaines nationaux, européens et mondiaux.

81) Une situation nouvelle s’est créée et l’expérience incite à trouver les formes les plus efficaces d’action. Cela est à l’origine de débats qui traversent le mouvement syndical dans l’ensemble des pays européens. Le défi maintenant c’est de montrer si les vieilles conceptions combatives et unitaires du syndicalisme restent fortes et valables malgré les tentatives et les pas faits pour encadrer l’activité syndicale dans une démarche de gestion, de collaboration, d’accompagnement et d’abandon de la lutte, comme cela était évident dans beaucoup de pays Européens.

3 - Un Programme d’actions et de coopérations syndicales avec tous.

82) Ce qui est décisif et radical dans cette situation, c'est que la solidarité internationale ne saurait se réduire à une répétition de principes, à une aspiration morale. Elle doit se concrétiser en termes d'engagements concrets, de comportements conséquents et déjà à partir des réalités nationales auxquelles nous tous avons été confrontés. Pour le dire clairement, il s'agit de se doter d'un programme et d'une pratique sociale effectivement internationaliste de telle façon à affaiblir les positions du capital dans son propre pays pour prétendre avancer vers des succès globaux et continentaux.

83) La solidarité internationale n'a d'intérêt que si elle peut contribuer à la mobilisation des travailleurs et des peuples et, par conséquent, à la réalisation de leurs propres objectifs. Ce qui renvoie aux orientations, aux priorités, aux méthodes, aux moyens et aux formes d'organisations dont historiquement dispose le mouvement ouvrier international s'il veut prétendre peser sur les politiques mises en œuvre tant par les entreprises, les institutions que par les gouvernements. Cela vaut pour tous et par conséquent pour la FSM.

84) Ainsi, par exemple, on ne saurait affronter les défis de la mondialisation sans donner une place essentielle à l'intervention des travailleurs. L'expérience des comités d’entreprises transnationales appelle un élargissement de ce type de structures à partir des entreprises, des branches et à l'échelle internationale, d'autant plus que le besoin de dialogue, d’échange et de confrontation suppose pour le mouvement syndical autre chose que la simple exigence dans la défense de droits syndicaux ou de places au sein des institutions internationales. Cependant ces comités d’entreprise servent fréquemment aux intérêts du capital et aux stratégies des multinationales, voila pourquoi on doit lutter pour sa vraie indépendance et pour qu’ils puissent servir aux véritables intérêts des travailleurs, en dépassant les pratiques actuelles de corruption et de collaborationnisme.

85) Les adversaires des travailleurs ont toujours su trouver les formes permettant de peser sur le contenu des exigences légitimes des travailleurs, par la division, la compromission et aussi la corruption…

86) Comment justifier que d’un côté il existerait une liberté totale pour les entreprises et les détenteurs de capitaux et que de l’autre le social devrait se contenter des structures fragmentées et faibles seulement reposant sur le seul niveau social.

87) Les temps à venir seront décisifs. Et pour certains elles sont déjà considérablement avancés, lourdes de risques en ce qui concerne les politiques de l’emploi, la protection sociale, l’exercice du droit syndical.

88) Un agenda de cette dimension exige sans aucun doute une autre évaluation de la place, des responsabilités, des objectifs et des initiatives qui doivent nécessairement impliquer le mouvement syndical. Ce problème est essentiel pour la FSM, les Unions professionnelles (UIS), les bureaux régionaux.

89) En fait, ce que l'on attend du mouvement syndical c’est une capacité renouvelée pour faire valoir les intérêts convergents de tous depuis le lieu de travail quels que soient les groupes, les branches, mais également les régions, les continents; tous les travailleurs, quels que soient leur statut, leur origine, mais aussi leur histoire, leur conviction, ils ont besoin de se rassembler pour être plus forts.

90) Soyons lucides ! Le mouvement syndical international constitue encore une force sociale organisée, tout à fait considérable, disposant d'un réseau d'une capacité à négocier, à se faire entendre et d'une représentativité sociale indiscutable, même s’il est toujours contesté et censuré. Nous sommes entrés dans une période nouvelle. Dans un marché du travail qui se mondialise, les entreprises transnationales organisent directement, avec l'aide des gouvernements et les institutions, la mise en concurrence des travailleurs.

91) Il existe donc un domaine très large d’intervention et de renouvellement des pratiques pour le syndicalisme à condition que celui-ci se tourne vers le monde du travail tel qu'il est devenu. Il doit le faire à travers une approche plus concrète et plus globale, plus radicale également, ce qui suppose de se dégager de tout formalisme, d'une institutionnalisation de son activité et par-dessus tout il s’agit d'admettre le débat et la démocratie dans ses propres rangs. Les syndicats se doivent de contribuer à créer les conditions de cette contre-offensive des peuples, ils ne sauraient pouvoir le faire sans prendre en compte la diversité et la libre expression des opinions, et tout ceci déjà au sein de leur organisation.

92) Tout cela suppose pour le mouvement syndical le besoin d'être, plus indépendant et plus autonome par rapport aux organismes financiers, économiques et politiques en place, un acteur et un animateur créatif du débat dorénavant engagé quant à l'alternative au système dominant, un véritable contre-pouvoir à confronter globalement les stratégies des sociétés transnationales, des institutions financières, comme celles des gouvernements ou des organes supranationaux. Cette exigence vaut tout autant pour les syndicats des pays industrialisés que pour les pays du Tiers monde. Nul ne saurait être dépositaire d'un mandat qui lui permettrait de parler au nom de tous à partir de valeurs et d'orientations élaborées de façon unilatérale.

Il faut clarifier certains objectifs !

93) Faute d’analyses suffisantes quant au contenu de cette situation, le syndicalisme apparaît fréquemment comme une force paralysée, un géant aux pieds d’argile n’agissant, qu’à la marge et presque chaque fois contraint de négocier les agendas qu’on lui impose.

94) Il en va ainsi, par exemple, du débat autour de soit disant « clauses sociales », au sein de l’OMC et de l’OIT, objectif promu par les gouvernements et les syndicats des pays capitalistes développés et qui fait l’objet d’une opposition d’autant plus résolue de la part d’un grand nombre des pays et des syndicats du Sud ceux qui connaissent la maîtrise que ceux-ci exercent sur toutes les institutions internationales et des pratiques hégémoniques qui prévalent dans celles-ci.

95) Il est clair que la mission fondamentale du syndicat n’importe où et n’importe quand n’est que la défense des droits et des intérêts des travailleurs. Dans ce sens tout le mouvement syndical a lutté et a réussi à la faire approuver en tant qu’une importante contribution à la Déclaration des principes de l’OIT sur les droits fondamentaux. ¿Mais est-ce que nous devons comprendre par hasard que ceux-ci sont les seuls droits à défendre ? N’est que ce ne sont pas non plus les droits à la vie, à la santé, à l’éducation, à l’alimentation, au logement, droits fondamentaux et inaliénables des travailleurs et des peuples ?

96) Dans un monde où 250 millions d’enfants sont obligés à travailler pendant que presque un milliard de leurs parents n’ont pas d’accès au travail, Est-il possible vraiment d’atteindre le proclamé Travail décent que réclame aujourd’hui l’OIT si ne se produisent pas des changements fondamentaux dans le système économique et politique qui est imposé dans le monde ? Pourquoi alors nous ne nous proposons pas de lutter aussi pour ces changements ?

97) Quelques aspects qui font débat dans le Mouvement syndical international sont très souvent source de divisions, d’oppositions nuisibles à la réalisation de l’unité entre travailleurs et syndicats des pays développés et ceux d’ un tiers du monde.

98) Les pays pauvres se font souvent concurrence pour vendre leurs produits aux pays industrialisés au prix le moins élevés possible e ceci fait que fréquemment les bourgeoisies nationales payées par les sociétés transnationales s’enrichissent au prix de leurs propres peuples. Mais, comment ignorer le but et l'action de l'ajustement structurel qui organise délibérément cette confrontation pour le plus grand bénéfice des industries des pays riches au détriment du développement ?

99) Pour quoi nous ne demandons pas aux 900 000 Mexicains qui entrent chaque année illégalement aux Etats-Unis franchissant la frontière parce qu’ils sont irrésistiblement attirés par la différence de revenus entre les deux pays, ou bien y sont-ils poussés par la dégradation rapide de 60% de leur terre arable et la ruine des champs mexicains due aux subsides agricoles élevés qui reçoivent les producteurs nord-américains avec qui il est impossible de concurrencer.

100) On pourrait multiplier les exemples comme celui de ces 100 000 enfants bengalis qui travaillent dans le textile et dont 50 000 ont été licenciés par les entreprises et qui travaillent aujourd’hui dans des secteurs encore plus précaires tout simplement parce que les patrons se sont anticipés a une législation américaine voulant répondre aux attentes d'une clientèle soucieuse des droits de l'homme. Ignorer ou feindre d'ignorer cette réalité, la voir manipuler pour des préoccupations protectionnistes au nom de la défense de l'emploi, c'est prendre le risque de se trouver placer dans un domaine qui n’est pas le nôtre.

101) Ce qu’il y a de vrai au sujet du respect de la mise en cause du travail des enfants l’est aussi pour le travail carcéral, et il est de notoriété que dans ces deux domaines particuliers les Etats Unis ne sauraient prétendre incarner l'exemple.¿ Sait-on que l'industrie pénitentiaire est devenue dans ce pays particulièrement lucrative ? Si l'on a condamné, non sans raison, les formidables profits réalisés par l'industrie allemande à partir du travail dans les camps de concentration, on pourrait s'indigner tout autant des bénéfices tirés de l'exploitation des condamnés dans les prisons Américaines par Boeing, Microsoft, Texas Instruments, Kentucky Fried Chicken et d'autres.
102) Il en va de même avec l’exercice du droit syndical. C’est au nom de la lutte contre le terrorisme que les USA et l’Union européenne ont considérablement renforcé leur législation antisociale, au point de chercher à criminaliser l’action syndicale, allant jusqu'à assimiler certaines formes d’actions de grève à une conception du terrorisme.

103) Dans ces conditions comment ne pas s’étonner que l’administration des USA s’est faite la championne de la « clause sociale », et d’une définition des normes sociales en fonction de l’évolution du commerce international, d’où l’idée d’un partenariat OMC/OIT défendue par l'administration nord-américaine, celle de l'Union européenne, et aussi par de nombreux syndicats des pays riches?

104) La valorisation des luttes parce qu’elles sont facteurs de confiance, la multiplicité des rencontres, des dialogues avec tous les secteurs de la société qui contestent la logique du système capitaliste, entre syndicalistes, forces politiques, environnementalistes, pacifistes etc. peuvent contribuer à faire grandir l’idée d’une contre offensive a partir de l’unité des travailleurs et des peuples. La structuration des luttes depuis les entreprises jusqu'à leur niveau professionnel, national, régional et international constitue un impératif auquel rien ne saurait se substituer.

105) Le syndicalisme international, s’il renforce son unité et les moyens de son intervention, peut anticiper et donc déterminer des ripostes appropriées, et contribuer à des avancements sociales réelles. Cela vaut pour tous les objectifs parmi d’autres :

- Le plein emploi pour tous et partout dans le monde est une exigence universelle, le salaire réel doit être rémunéré à partir des besoins permettant de vivre dignement.
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- L’éradication de la précarité. Application des politiques économiques, s’accompagnant d’une protection et assistance sociale de haut niveau couvrant tous les domaines de la vie des travailleurs actifs, retraités ou privés d’emploi, ou contraint à des travaux informels.

- Le respect permanent de tous les droits des travailleurs à partir de l’avis de l’indivisibilité et de l’irréfutabilité de ces droits.

- Empêcher et faire tourner la privatisation et du démantèlement des services publics dans les secteurs essentiels tels que la santé, l’eau, les télécommunications, l’éducation, les transports, l’énergie, et tout ce qui touche à la vie quotidienne des gens, constitue un impératif. Celui ci suppose de contribuer à la mobilisation contre toutes les formes d’ouverture de ces secteurs et d’autres aux règles du marché, à l’investissement privé, à l’intervention directe des sociétés multinationales qui pillent les ressources et imposent les règles du jeux des gouvernements nationaux en les dégageant de leur souveraineté et indépendance. Après l’échec de l’Accord multilatéral sur l’investissement (AMI), il en va ainsi de l’opposition nécessaire aux négociations sur l’AGCS (accord général sur le commerce des services) soutenu par les USA et l’Union européenne.

- L’exercice du droit syndical doit être fondé sur le libre choix, l’indépendance et le rejet de toutes formes d’intervention étrangère aux intérêts des travailleurs qu’elles soient gouvernementales, patronales, religieuses ou autres. Les représailles contre le libre exercice du droit syndical, du droit de grève et la violence qui s’exerce contre des syndicalistes dans de nombreux pays, comme par exemple en Colombie, mériterait que le Mouvement syndical prenne des initiatives unitaires visant à mettre fin à ces agissements. Il faut enfin mettre un compas d’arrêt aux mesures d’exception contraires aux droits de l’homme mises en place sous le prétexte de lutte contre le terrorisme.

- Dans les cas qui précèdent la responsabilité des gouvernements est établie mais celles des transnationales doit l’être également et doivent être soumises aux législations nationales et internationales, être contraintes à assumer leurs responsabilités, á rendre des comptes. Les nations doivent être les seules ayant le droit de propriété sociale sur la terre et leurs ressources naturels de même que sur leur infrastructure industrielle, agraire et minière. Les Etats doivent conserver la maîtrise de leur politique économique, sociale et des grands medias et non déléguer celle-ci à des organes supranationaux ou aux sociétés transnationales et d’autres institutions financières. Cela est vrai dans tous les domaines : la politique, l’économie, la fiscalité, le commerce, la transparence financière, la protection sociale, le droit du travail, la culture, la sécurité alimentaire, l’environnement, etc.. L’intervention des travailleurs dans tous ces domaines constitue un impératif, un besoin

- La lutte pour la paix doit être le drapeau de lutte des travailleurs et de leurs organisations dans le monde. Il ne peut pas y avoir de paix sans le respect des droits de chaque peuple à sa souveraineté, son indépendance et son autodétermination, et à co

Publié dans INTERNATIONAL

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